Chers amis, Monsieur le Premier Ministre,
C’est un vrai parti politique qui exprime ce matin sa fierté de vous accueillir ici à Suresnes.
Pourquoi un nouveau parti politique ? Pourquoi Gauche Moderne, aile gauche de la majorité présidentielle ?
J’ai lancé, avec mes amis, La Gauche Moderne il y a un an, ex nihilo, pour donner un sens politique et collectif à mon acceptation de l’ouverture proposée par le Président de la République en juin 2007.
Un an plus tard, les circonstances politiques exceptionnelles que nous vivons justifient totalement ce choix.
• D’abord un monde qui a changé très vite, une France qui a pris du retard et une crise internationale sans précédent.
· Ensuite une majorité qui autour du Président de la République et du Premier Ministre conduit avec détermination et courage la modernisation de notre pays par la méthode de la Réforme Juste.
· Ensuite, pour tous les hommes et les femmes de gauche que nous sommes, le constat de la faillite de la gauche archaïque française, illustrée par le pathétique, et pourtant si prévisible, congrès du PS qui s’achève en ce moment.
Oui, nous sommes et nous restons, comme des millions de Français, attachés à notre histoire et à nos valeurs de gauche.
Oui, nous avons cru très longtemps, et nous avons espéré trop longtemps, que la gauche française, et le PS en particulier, sauraient trouver l’audace d’une nécessaire rénovation, à l’instar de toutes les gauches européennes, sans exception, du nord au sud…
Et, oui, nous pensons qu’il y a aujourd’hui une opportunité, pour des citoyens se reconnaissant dans les valeurs et dans les idées de La Gauche Moderne, de trouver librement et loyalement leur place au sein de la majorité.
Plusieurs raisons à cela :
· La politique de réforme engagée par le gouvernement auquel je suis fier d’appartenir, a, en effet, d’ores et déjà fait bouger les lignes politiques anciennes ; elle ne se conduit pas, cette politique, camp contre camp, mais avec courage, justice et pragmatisme. Déjà les lignes politiques anciennes sont en train de bouger.
• Dès à présent, La Gauche Moderne a contribué, par ses positions, par ses réflexions, à la mise en œuvre de ses idées, que ce soit pour le RSA et, spécifiquement, son financement, ou pour ce projet de flexisécurité qui nous tient tant à cœur et dont le Président a commencé à jeter les bases, dans son discours de Rethel, le 28 octobre dernier, indiquant que le gouvernement allait le mettre en œuvre, sous le nom de Sécurité sociale professionnelle.
• Dans ce même temps, les vieux comportements sectaires et caricaturaux de diabolisation de Nicolas Sarkozy ne fonctionnent plus comme avant, et un nombre croissant de femmes et d’hommes de gauche refusent de tomber dans ce piège et reconnaissent au Président de la République, surtout depuis le début de la crise actuelle, de vraies qualités d’homme d’État et une authentique sincérité dans sa démarche politique novatrice, consistant à bousculer durablement les clivages traditionnels et les schémas dépassés.
• Une vraie attente de changement, un rejet profond du PS et de ses errances mortelles, un regard plus mesuré, plus lucide, sur la personne du Président de la République, son énergie, son engagement, voilà ce que vivent et ressentent un nombre croissant de sympathisants de la gauche et du PS.
Reste à susciter leur adhésion à une démarche utile et constructive, en en faisant des acteurs engagés.
Et cela, aucune démarche individuelle, aussi brillante et utile soit-elle, ne peut à elle seule le symboliser.
Seul un vrai parti politique, doté d’un corps de doctrine, de propositions, capable de dire oui parce que susceptible de dire non, soutenu par des adhérents et des militants dans toute la France (en métropole et outre-mer), apte à se confronter au suffrage universel, peut l’entraîner, lui donner sens et contenu.
Seul un vrai parti politique peut structurer cet engagement qui ne demande qu’à s’exprimer, lui donner une vraie place au sein de la vie politique française et contribuer utilement, le moment venu, à la poursuite du travail de réforme engagé.
La Gauche Moderne est ce nouveau parti, et entend prendre toute sa place à l’aile gauche de la majorité.
Cette affirmation nous engage et nous oblige.
Au niveau des idées, de l’esprit critique et des propositions que nous avons à faire, à les exprimer le plus en amont possible, au moment où il est encore possible de peser.
Et plus nous serons forts, et plus nous pèserons :
• Cette Flexisécurité à la française que nous défendons depuis longtemps, notre rôle c'est de faire que, derrière les mots, qui sont vraiment ceux que nous attendions, on aille le plus loin possible dans la construction d'un dispositif réellement efficace et novateur. Pas simplement une restructuration a minima des dispositifs existants. Pour cela nous avons nombre de propositions plus précises à faire, parfois un peu techniques, qui articulent formation, aide à la recherche d'emploi, etc, et nous les ferons. Mais je dois dire que le contrat de transition professionnelle, qui est déjà une réalité, est un très bon modèle pour envisager les dispositifs à créer et à développer pour construire cette flexisécurité à la française.
• Sur la fiscalité aussi il faut progresser, innover. : les deux tiers de l'impôt sur le revenu sont payés par un ménage sur huit, qui ne sont même pas les plus riches, puisque les systèmes de niches les font échapper très largement à l'impôt direct.
• Nous nous sommes beaucoup battus pour le plafonnement des niches fiscales, qui vient d'être voté. Mais nous voulons aller plus loin que ce qui a déjà été fait.
• L'impôt sur le revenu, tel qu'il est, est devenu incompréhensible et bien souvent injuste. La CSG est l’exemple d’une Flat-Tax (impôt à taux fixe) qui marche très bien, qui est assise équitablement sur tous les revenus et pour laquelle il n’y a pas de niches innombrables. On pourrait regarder de ce côté pour améliorer la justice dans la répartition de l’impôt.
• Et puis, comment ne pas évoquer ici, la crise financière que nous vivons et dont les graves conséquences commencent seulement à apparaître. Nous serons aux avant-postes, pour que la solidarité nationale s’exprime, sans retard, vers ceux qui seront frappés, parfois durement, par les contrecoups de cette crise. Nous serons là pour veiller à ce que personne ne reste au bord du chemin.
• La réforme économique, pour la performance, la flexibilité et la compétitivité de notre économie, c’est une ambition légitime, et c’est absolument la notre. Mais quel serait son sens si elle ne servait le besoin de justice et de solidarité. Que serions nous, nous-mêmes, si nous n’étions pas ceux qui, au sein de la majorité, au gouvernement, sont les premiers à rappeler, à tous, cette nécessité.
• Puisque nous abordons de la crise financière je veux dire un mot sur les paradis fiscaux et règlementaires : jusqu’à quand devra-t-on tolérer que de véritables trous noirs financier engloutissent des milliards d’Euro de la richesse réelle, créée par le travail des femmes et des hommes, dans des aventures spéculatives opaques, bénéficiant à quelques milliardaires peu scrupuleux….
• Sur la Sécurité et la prévention, l’école, la Justice, je reviendrai demain sur toutes nos réflexions et nos propositions, de même que sur la construction et le renforcement de l’Union Européenne, qui nous sont si chères.
• Je voudrais ici, maintenant, saluer l’action du Premier Ministre, saluer son courage, sa pugnacité, sa rigueur et sa ténacité sur le terrain des réformes dont notre pays a besoin. Saluer celui qui a su prendre sur lui, dans les moments les plus difficiles, pour rappeler l’ardente obligation, l’urgence et la nécessité de la Réforme. Mais je voudrais aussi saluer celui qui, depuis le premier jour, a témoigné sa confiance et son soutien à la démarche de la Gauche Moderne. Oui, je lui dis ici, en votre nom, merci.
• Nous tenons ici un vrai congrès, d’un vrai parti de gauche, c’est à dire qu’avec le millier d’adhérents, qui seront bientôt plus de 1500, avec plus de 150 élus lors des dernières élections municipales, et ceux qui nous ont rejoint depuis, nous avons de vrais débats autour de nos textes, autour d’idées, de conceptions, de propositions pour l’avenir, pour le pays, pour l’Europe. Nous n’avons pas de querelles de préséance, pas de ces médiocres batailles sur des questions subalternes.
• Ceux qui ont lu les textes préparatoires de notre congrès fondateur ont compris où réside la valeur ajoutée de La Gauche Moderne : appuyés sur une solide tradition de gauche et sur une véritable volonté pragmatique de modernisation et d’adaptation aux temps nouveaux, nous faisons le lien entre le progrès économique, et les moyens nécessaire à son émergence. Sans succès économiques comment réaliser les nécessaires avancées en matière de justice sociale, et d’un autre côté, comment construire une société du succès et de la performance, sans un sentiment partagé de justice sociale ?
• La préparation de notre congrès à été l’occasion que se construise notre parti là où il n’existait pas encore. Il faut reconnaître qu’un vrai courant d’adhésions spontanées, s’est manifesté et se renforce ces derniers jours. Nous avons installé des coordinations régionales dans 20 régions, en Métropole et Outre-mer, dans 45 départements se sont constitué des fédérations départementales actives, qui dès maintenant sont sur le terrain.
Martine ou Ségolène, Ségolène ou Martine, il n’y a pas de prénom meilleur que l’autre pour perdre.
Nous, nous nous reconnaissons d’abord dans des idées, et des idées qui gagnent, parce qu’elles font avancer le pays, parce qu’elles sont sur le pont, contre la crise.
• Nos idées ne cèdent pas à la démagogie de l’extrême gauche, avec ses slogans, en apparence généreux, comme l’interdiction des licenciements. Il est mortifère pour un parti de gauche, qui se voudrait responsable, de reprendre ces slogans irréfléchis, avec l’ambition de gouverner. Car c’est l’échec assuré. Et jamais une majorité de Français ne voudra tenter un échec si clairement annoncé.
· Ces derniers jours on m’a beaucoup demandé : « mais au fond, pourquoi ne pas rejoindre la grande fédération des centres en constitution, ce sont comme vous des gens pragmatiques, responsables, européens, sensibles à la question sociale ».
· Je répondrai, c’est vrai, sur nombre de sujets nos avis, nos propositions sont voisines, et humainement, force est de constater que nous nous entendons très bien !
· Mais un Parti c’est autre chose, autre chose qu’un moment privilégié où, dans l’exercice des responsabilités, des hommes et des idées se rapprochent, comme c’est le cas aujourd’hui. Un parti, c’est une histoire, une philosophie, un regard sur le monde, dans lesquels des militants, des sympathisants, et, au delà, des électeurs, vont ou non se reconnaître. Nous, notre histoire, c’est la gauche. Avec ses ombres et ses lumières, mais c’est ainsi. C’est de la gauche que nous venons, c’est cette histoire qui nous fonde, et c’est elle qui fera que des millions d’électeurs, demain, au moment des choix décisifs pour la poursuite de la politique de réforme dans notre pays, choisiront de dire « oui il faut continuer les réformes, oui il faut donner un nouveau mandat à cette équipe qui dirige le pays ».
· C’est tout le sens de notre présence dans cette majorité, qui aujourd’hui assume, dans des conditions de crise que nul n’avait prévu aussi forte, aussi profonde, aussi étendue, la Réforme nécessaire à notre pays, celle qui nous fera sortir plus forts, plus justes, plus unis, de cette épreuve.
· Dans cette majorité, toutes les sensibilités ont leur mot à dire, et le disent. Chaque semaine et sans détour, nous exprimons notre sentiment, notre adhésion très souvent, nos critiques parfois, nos propositions toujours.
· Vous le comprenez bien, si c’est une formation toute jeune qui nait aujourd’hui, c’est aussi une formation solide, ancrée dans son histoire, ancrée aussi dans ses alliances, alliances faites de libre adhésion et qui parce qu’elle est libre s’inscrit dans la durée.
Jean-Marie Bockel