Dominique Strauss-Kahn, nous fait la danse du ventre, et il est vrai qu’il n’en manque pas. Il fait le beau, mais incertain de sa grâce, il se fait « doubler » par sa femme dans les passages délicats. Manifestement l’idée de devenir Président vient agréablement caresser son ego mais le chemin à emprunter pour y arriver lui fait peur, et il ne se décide pas à s’y engager franchement. Il serait pourtant si simple de dire qu’il n’a pas l’intention de solliciter un deuxième mandat de directeur général du FMI…Il s’est bien gardé de le faire. Sans doute, malgré toute la Com’ qu’il met en branle, et qui est son vrai talent, n’est-il pas si rassuré, et on peut le comprendre. Il n’est pas certain de pouvoir triompher de ceux qui s’opposent à sa candidature, Hollande, Royal, Hamon et peut-être Aubry qui s’éloigne de plus en plus d’un prétendu accord marocain.
Il faut dire que ce sont les militants socialistes (plus quelques sympathisants souvent d’extrême gauche) qui participeront aux primaires, et qu’il n’a jamais été à l’aise avec les militants. Par peur de se « compter », il n’a jamais osé déposer de motions lors des congrès du PS, et il n’a sûrement pas oublié la défaite cinglante que lui a infligé Ségolène Royal lors des dernières primaires.
Et son meilleur argument, selon lequel il serait le seul, d’après les sondages, à pouvoir battre Sarkozy, s’effondre ! Tous les socialistes battraient aujourd’hui le Président sortant !
Nicolas Sarkozy, justement, danse le tango : un pas en avant deux pas en arrière. Alors qu’il était engagé dans une opération de « re-présidentialisation » qu’il menait plutôt bien, des déclarations justifiées mais à l’emporte pièces sur les magistrats, le lancement sans précautions d’un débat sur l’Islam, et une prudence légitime, mais obscurcie par les erreurs d’une ministre des Affaires étrangères heureusement remplacée, sur les « révolutions arabes », sont venues tout démolir. Sa bonne intervention dans l’émission « face aux Français », sur TF1, sa conférence de presse de haute tenue sur le G20, et sa visite appréciée du salon de l’agriculture, sont balayées. Il se retrouve à nouveau au plus bas dans les sondages alors qu’il progressait régulièrement. Et sa brève allocution sur la situation internationale, l'autre dimanche, n’a pas pu changer les choses.
Et le voilà la cible de tous les représentants de l’establishment - hauts fonctionnaires, diplomates, magistrats ou enseignants - qui ne l’ont jamais accepté, parce qu’il était étranger, d’origine familiale d’abord, mais aussi étranger à leur monde, aux grandes écoles qui les ont formatés, à leurs codes et à leur hypocrisie « droit de l’hommiste » et égalitariste alors qu’ils défendent farouchement leurs privilèges de caste, qu’ils sentent menacés. Emoustillés sans doute par les révolutions du sud méditerranéen, on les voit se lancer courageusement (mais souvent anonymement), à l’assaut du Président.
Pour lui, donc, la situation n’est pas facile, même si on peut supposer qu’elle s’améliorera avec les bons résultats attendus (oui, ils se font attendre), sur le chômage et la lutte contre la délinquance et l’insécurité.
Jean-Louis Borloo fait semblant de se préparer à entrer dans la danse. Habitué des pistes, virtuose dans un grand nombre de figures compliquées, son talent en charme plus d’un, mais il ne se décidera sans doute pas. Nicolas Sarkozy, qui ne souhaite pas le voir candidat, pourrait, après les sénatoriales, lui offrir le poste de Premier ministre, ce qui permettrait de récupérer in extremis l’électorat centriste qui sera bien utile, en abandonnant un Fillon qui perd semaine après semaine sa popularité, plus vite encore que le Président, et qui n’aura bientôt plus d’intérêt pour lui.
Dominique de Villepin et François Bayrou, paraissent avoir abandonné la danse du scalp qu’ils menaient autour de Nicolas Sarkozy, et adopté une attitude d’opposition plus digne et moins personnalisée.
Marine Le Pen, se fait remarquer dans une version modernisée de la moringue, cette danse martiale, toute en faux semblants. Inutile d’insister, moins on parle d’elle et mieux ça vaut, mais il est certain qu’elle s’apprête, avec démagogie et talent, à jouer un rôle important dans cette campagne. Espérons qu’elle s’arrêtera au premier tour, sur la piste et ailleurs…
Et pendant ce temps-là, Jean-Marie Bockel, spécialiste talentueux du « slow », qui demande, on le sait, beaucoup de concentration et de subtilité, prend encore quelques cours de danse avant d’oser se lancer sur la piste. Il pourrait pourtant le faire, il en a les capacités, il en a la légitimité. Sa candidature permettrait d’offrir un choix complet à gauche. En effet, si la situation restait ce qu’elle est, l’électeur de gauche n’aurait le choix, lors de l’élection présidentielle, qu’entre l’irréalisme de l’extrême gauche et l’immobilisme du PS. Or, une autre gauche existe, réformiste, réaliste et responsable. La Gauche Moderne, qui en est l’illustration, se décidera-t-elle à présenter un candidat ? Je ne peux que le souhaiter.
Mais, tout cela n’est que supputations, le bal populaire vient juste d’entrouvrir ses portes et les musiciens n’ont pas fini d’accorder leurs instruments… Des surprises sont certainement à venir. Encore un peu de patience…
Marc d’Héré